En avant pour les monnaies locales

Le numéro du 8 avril 2016 du quotidien Sud-Ouest titre : « Pays basque : l'eusko, première monnaie locale française payable en carte bleue ». En effet, la monnaie locale est maintenant légalement autorisée depuis la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire, dite « Loi ESS ». De quoi s’agit-il ?
C’est une vieille histoire. Dans les années 1930, en pleine crise économique mondiale, dans un petit village autrichien, Wörgl, est née l’idée d’une monnaie locale. Les initiatives individuelles étant libérées, ce fut une véritable explosion de l’activité économique, à tel point que le chômage, qui atteignait 60% de la population, a complètement disparu en un an. Bien sûr, comme vous vous en doutez, cela n’a pas duré : l’Etat, ainsi que les banques, sont intervenus pour interdire la prolongation de cette expérience.
Depuis, la monnaie locale était interdite, du simple fait qu’elle court-circuitait le fisc. La loi ESS a résolu le problème et la création de monnaies locales est maintenant autorisée en France. Aujourd’hui, une monnaie locale a été créée dans une vingtaine de communes de France et concerne quelques centaines d’adhérents dans chaque association. C’est donc tout à fait marginal.
Cependant l’enjeu est de taille puisque la première raison pour créer une monnaie locale est de favoriser la consommation locale. Voyons comment cela se passe en Allemagne, où l’expérience existe déjà depuis plusieurs années…
Ainsi qu’on peut le lire sur Wikipédia, le Chiemgauer est une monnaie régionale allemande qui a commencé en 2003 à Prien am Chiemsee, en Bavière.[.Christian Gelleri, professeur dans un lycée, a fondé ce projet avec ses élèves qu'il a chargé du dessin, de l'imprimerie des coupons, de l'administration, de la comptabilité, de la publicité et d'autres services. Actuellement, le Chiemgauer fait partie du réseau national de monnaies régionales en Allemagne (RegioNetzwerk).
Le Chiemgauer circule dans la région de Chiemgau de la façon suivante : les consommateurs échangent 100 € contre 100 Chiemgauers à une association qu'ils veulent soutenir sans devoir faire de don. Ils peuvent ensuite les dépenser dans des magasins locaux, à parité avec l'euro. Les magasins qui acceptent les Chiemgauer peuvent les dépenser à leur tour pour leur propres achats ou les revendre 95 € les 100 à l'émetteur des Chiemgauers. La perte est consentie car ces magasins gagnent la clientèle des consommateurs qui participent au programme. Les associations achètent 100 Chiemgauer à 97 € et les vendent aux consommateurs 100 €, d'où un bénéfice de 3 € à chaque transaction. Le bureau émetteur des Chiemgauers en vend 100 pour 97 € et il les rachète à 95 €, la différence remboursant les frais administratifs.
Le système a démarré en 2007 avec 2400 membres et leur nombre actuel est de 3000. 650 magasins participent à l'opération et le chiffre d’affaires annuel, qui était de 1 450 000 Chiemgauer en 2006 atteint aujourd’hui 6 millions de Chiemgauer. Imaginons que 1500 expériences semblables se développent en France, soit 15 par département ; cela représenterait 10 milliards d’euros, soit de l’ordre de 300 000 emplois. C’est donc un dixième du nombre actuel de chômeurs. Et rien n’interdit d’aller plus loin.
L’aspiration profonde de beaucoup de Français se focalise en deux points : vivre plus près de la nature et être son propre patron. Il y a là une réelle opportunité. Il faut pour cela dépasser la logique associative, qui ne crée que des activités économiques marginales, et utiliser cet outil pour réindustrialiser la France. Allez dans un super marché et regardez tout ce qu’on y trouve : des produits souvent fabriqués à l’étranger. Pourquoi ne pas les produire localement ? Les imprimantes 3D commencent déjà à révolutionner la manière de produire. Or on peut se procurer une imprimante 3D professionnelle à partir de 12 000 euros. Il suffit que quelques familles se cotisent et l’acquisition est faite. Sans parler du soutien à l’agriculture locale.

Les moyens de développer des économies locales existent
Saisissons-les