A propos des Bonnets rouges

« Le mouvement des Bonnets rouges est un mouvement de protestation apparu en Bretagne en octobre 2013, en réaction aux mesures fiscales relatives à la pollution des véhicules de transport de marchandise et aux nombreux plans sociaux de l'agroalimentaire. Cette mobilisation massive pour l’emploi et contre l’écotaxe en Bretagne déstabilise le gouvernement, au point de conduire le Premier ministre à annoncer, en moins de deux mois, une grande réforme fiscale et un « Pacte d'avenir pour la Bretagne ». Après deux grandes manifestations de masse à Quimper et à Carhaix-Plouguer en novembre 2013, il se prolonge sous la forme d'un collectif et de comités locaux. ».
C’est ce que nous dit Wikipédia. Mais qu’en est-il en réalité ? Qui sont les animateurs des Bonnets Rouges, quelles sont ses têtes pensantes ?
Cette question est d’autant plus importante qu’en novembre 2013 a été fondé un « Mouvement des Bonnets Rouges » qui a publié une plate-forme en 7 points, laquelle nous apprend que ce mouvement en a « fini avec l’antique lutte des classes » et se déclare « ennemi de l’oligarchie mondialisée ».
A première vue, voici un mouvement qui a toute notre sympathie. Portant une recherche plus approfondie nous permet de découvrir que, dans son journal « Le Bonnet Rouge », le mouvement se déclare anarchiste. Par ailleurs, on sait que le patronat local a joué un rôle décisif dans le développement du mouvement. Qui sont donc ces patrons ? Parmi les patrons influents, on trouve « l’Institut du Locarn », dont l’objectif déclaré est « le développement de la région en se référant au principe de subsidiarité ». L’institut est également le siège de l’Association « produit en Bretagne ». C’est une association fondée en 1993 qui compte à ce jour plus de 300 entreprises membres qui emploient plus de 100 000 salariés[1].
Venons-en à l’analyse politique. Nous, royalistes, sommes fermement partisans du principe de subsidiarité, qui est un des éléments centraux de la doctrine sociale de l’Eglise. Devons-nous pour autant soutenir le mouvement des Bonnets Rouges ? Ou, pour le dire autrement, ce mouvement lutte-t-il pour le bien commun ?
Regarder ce qui s’est passé en Bretagne avec un an de recul présente un avantage : celui de s’interroger sur la raison pour laquelle la mobilisation est retombée et ce qu’il aurait fallu faire pour l’éviter. Il est clair que les revendications exprimées – la « primauté des territoires », une « véritable décentralisation », etc. – étaient suffisamment vagues pour ouvrir la voie à toutes les récupérations possibles.
Il aurait fallu que le mouvement s’unisse autour d’un objectif clair. Or la référence au principe de subsidiarité est ambigüe. Il ne suffit pas, en effet, de l’avancer pour justifier les revendications bretonnes face au pouvoir central. Il faut aussi avoir la volonté de le mettre en pratique à tous les niveaux de la société bretonne. Or les premiers concernés par le principe de subsidiarité sont les agriculteurs. En effet la structure des prix imposée par la grande distribution les réduit à l’état d’esclaves.
Si la production agricole était contrôlée par une seule entreprise – c’est juste une image permettant de comprendre le raisonnement – il y a longtemps que celle-ci se serait donné les moyens de réaliser ce que les managers appellent « l’intégration verticale », c’est-à-dire une fusion de la production et de la distribution.
Le sort des agriculteurs intéresse tout citoyen français car ce sont eux, en principe, qui nous nourrissent. Il n’en est plus ainsi, malheureusement, puisque la France n’assure plus l’autonomie alimentaire de ses habitants. La France achète 43% de son lait et de ses fromages à l’Allemagne. Elle achète sa viande en Russie et en Nouvelle-Zélande, ses légumes en Espagne et ses fruits au Maroc en assassinant ses agriculteurs[2]. Et le résultat de tout cela est que l’on mange de plus en plus mal, comme tout le monde s’accorde à le reconnaître.
La recherche du bien commun voudrait que les paysans développent une agriculture biologique, naturelle et saine. Mais ceci suppose un financement. Il faut en effet cinq ans de reconversion de la terre avant que l’agriculture biologique soit rentable.
Les capitaux nécessaires ne peuvent être trouvés que dans une intégration de la production et de la distribution. C’est pourquoi, dans un première application du principe de subsidiarité, le mouvement des Bonnets Rouges, ou un mouvement équivalent, doit réclamer

L’appropriation des grandes surfaces par les paysans

Ce mot d’ordre traduit à la fois l’aspiration des agriculteurs à l’établissement de prix qui ne les obligent pas à vivre de subventions, l’aspiration de nombre de Français à « vivre au pays » (« pays » au sens de la loi Pasqua), l’amorce d’un retour à une autonomie alimentaire de la France et l’ouverture vers l’établissement de circuits courts entre production et consommation, qui pourrait s’étendre à la petite industrie.


[1] Source : Lectures Françaises N°681 de janvier 2014
[2] Henri Fouquereau : « Pour la France », Perspectives libres, juin 2014